Lectures de l’économie. Comment dire un imaginaire économique?

Le nouveau numéro de la revue Études françaises (vol. 59 no 1) est consacré à un dossier intitulé « Lectures de l’économie. Comment dire un imaginaire économique? ».

Dans L’art d’être juste (1995), Martha Nussbaum invitait à ce qu’on confronte l’imagination littéraire à l’économie. Cette invitation semble avoir été entendue. Dans Le capital au XXIe siècle (2013), Thomas Piketty ne cesse de renvoyer à Balzac et à Austen pour illustrer les variables économiques des siècles passés, tandis que des romancières ou des romanciers comme Houellebecq se font économistes (Bernard Maris, Houellebecq économiste, 2014). À partir de la littérature, Joseph Vogl a lu dans la crise financière de 2008 Le spectre du capital (2010), ce qui a engagé un surcroît d’intérêt pour les dettes, soudainement lisibles dans la culture (David Graeber, Dette. 5 000 ans d’histoire, 2011).
La question au cœur de ce numéro s’inscrit donc dans ce chantier : comment parler du lien entre économie et littérature de façon sensible aujourd’hui ? Comment sortir des simples oppositions entre l’économique et le symbolique, que Pierre Bourdieu nommait « l’économie à l’envers », pour décrire la relation entre les deux domaines, ou encore entre l’économisme orthodoxe et la pensée marxiste ? Il existe, peut-on penser, un « imaginaire économique », c’est-à-dire une manière de dire l’économie, d’en nommer le fonctionnement, les rouages, les limites ; la littérature et sa théorie peuvent l’éclairer. Les articles réunis dans ce dossier tâchent donc, depuis le Moyen Âge jusqu’à l’extrême contemporain, de montrer comment la littérature sert cet imaginaire.

Numéro préparé par David Bélanger et Martine-Emmanuelle Lapointe